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19 mai 2011 4 19 /05 /mai /2011 22:00

Cannes 2011, acte I. Le film d’ouverture, la dernière réalisation de Woody Allen, est sur les écrans français. Et alors ?

 

 

 

 

 

 

Midnight in Paris de Woody Allen (2011)

 

… Ainsi se poursuit, inlassablement depuis 2005 en dépit du retour à New-York pour Whatever works, le « Woody European Tour » : après Londres, après Barcelone et avant Rome, Woody Allen fait une halte à Paris, la plus belle ville du monde. Au début de ce long (trop long, persifleront certains !) périple, nombreux ont été les critiques et les spectateurs à s’enthousiasmer de la vitalité retrouvée du cinéma du bonhomme au contact de l’Europe, regain de vitalité qui paraissait inespéré après un passage à vide allant en gros de Celebrity (1998) à Melinda et Melinda (2004), certaines mauvaises langues (mais peut-être pas si mauvaises que cela finalement !) faisant remonter ce passage à vide à bien plus longtemps encore. Mais qui s’étonnait alors des étranges et très grossières similitudes (sauf la fin, beaucoup plus cynique chez Woody) entre Match Point et Une place au soleil de George Stevens ? Qui fulminait devant ces films sans âme faits sans inspiration (Le rêve de Cassandre) et, parfois copies de précédents long-métrages (Scoop) ? Qui dénonçait l'ennui suintant insidieusement de Vicky Christina Barcelona ? Tout ça commençait à sentir sérieusement l’imposture cependant que Woody restait en France le chouchou éternel de nos critiques. Retour d’ascenseur : Woody décide donc de déclamer son amour à Paris.

Avec ce nouvel épisode des aventures européennes de Woody, on a la confirmation que le cinéma du Woody Allen fait du surplace. Sans bruit et sans fureur, au rythme d’une livraison annuelle comme il se doit, plus métronomique que le métronome lui-même, Woody fait du surplace et donc ennuie profondément. Reprenant quelques gimmicks usés jusqu’à la corde c’est-à-dire la traversée du miroir et/ou des époques (voir La rose pourpre du Caire, voir Alice), le nouveau film de Woody Allen met en scène un scénariste américain qui a la tentation d’échapper à son pays, à son époque et à son histoire (son mariage imminent avec une jeune femme de la haute bourgeoisie new-yorkaise dont la famille, très « tea-party », ne lui convient pas des masses) pour découvrir une vérité intemporelle : savoir être heureux (ou tout du moins le moins malheureux possible) hic et nunc. Le problème avec ce nouvel opus c’est que tout est finalement prévisible : la morale de l’histoire, car il y a une morale malgré tout, se devine dès la rencontre du héros avec Adriana/Marion Cotillard, muse du tout Paris artistique des années folles. Mais, hélas, le scénariste-cinéaste se croit obliger de l’expliquer clairement, preuve que tous les réalisateurs ne font pas forcément confiance à l’intelligence de leurs spectateurs. Dans le même ordre d’idée, l’idylle naissante avec une femme du réel, la jeune antiquaire jouée par Léa Seydoux, se détecte à mi-parcours du film pour tous ceux qui ont, ou n’ont pas, l’habitude de se coltiner le visionnage d’aimables « bleuettes » romantiques. Entretemps, le spectateur aura supporté la succession fastidieuse et sans profondeur de tout ce que le Paris artistique et littéraire compte de célébrités dans les années 20 (Picasso, Gertrude Stein, Hemingway et j’en passe…) interprétées par des stars triées sur le volet : la palme d’or revient sans hésitation à Adrian Brody singeant Salvador Dali : surréaliste ! Tout cela sent finalement la naphtaline et a rarement à voir avec l’idée que l’on se fait du cinéma. On ne parlera donc pas de la mise en scène, Woody Allen n’étant pas précisément connu pour être un « inventeur de formes ».

Un adage bien connu dit que c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes… C’est sûrement vrai quand on voit les dernières productions d’Alain Resnais, de Raúl Ruiz ou encore de Manoel de Oliveira. Dans le cas de Woody Allen, c’est moins certain et, croyez-le ou non, on est les premiers à le déplorer…

 

Eric Popu

 

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