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18 avril 2013 4 18 /04 /avril /2013 15:03

Au cours de l'année scolaire 2012-2013, une classe de 1ère du Lycée Mariette a participé au Prix Jean Renoir des lycéens. Dans le cadre de l'éducation à l'image cinématographique, ce prix, anciennement Prix National lycéen du cinéma, sorte d'équivalent du Goncourt des lycéens, met l'accent sur l'engagement de nombreux lycéens (une classe par académie) en tant que jury dans le processus de choix d'un film primé parmi une sélection qui comprenait, cette année, huit longs métrages. Après plusieurs mois de fréquentation des salles obscures, chaque classe désignait des délégués pour défendre le film que la classe avait choisi et pour participer aux débats permettant, au niveau national, d'élire le meilleur film. Ces débats ont eu lieu à Paris au début du mois d'avril. Le film qui a remporté le Prix Jean Renoir 2013 est César doit mourir des Frères Taviani.

Le blog des Routes de la critique, toujours soucieux de donner la parole aux cinéphiles en herbe ou même confirmés, propose de revenir sur quelques uns des films vus par les élèves encadrés par Madame Sourget. On commence par le premier film de la sélection : La Vierge, les Coptes et moi... 

 

 

La Vierge, les Coptes et moi... de Namir Abdel Nesseeh (2012).

 

Sorti le 23 août 2012, ce « petit » documentaire français d’1h30, nous plonge au cœur de la communauté chrétienne en Egypte en compagnie du réalisateur Namir Abdel Messeeh et de ses proches pour nous faire découvrir la culture copte et le mythe de l’apparition de la Vierge… Ce documentaire-fiction est une mise en abyme du réalisateur faisant son film. Ce dernier part en Egypte alors qu’il n’y a pas mis les pieds depuis 10 ans pour non seulement retrouver les siens mais aussi pour faire un film sur les apparitions miraculeuses de la Vierge. Sans beaucoup de preuves, il interroge la population égyptienne sur ces fameuses apparitions. Avec l’aide de son producteur qui finit par lui mettre la pression et le laisser tomber, Messeeh trouve du réconfort et de l’aide auprès de ses proches pour aboutir sa création. Au cours de ce voyage en compagnie de personnages attachants, nous pouvons dire qu’avec très peu de moyens, Messeeh nous emporte dans son univers entre réalité et fiction, qui parfois nous laisse confus. Camera à l’épaule, nous rentrons vraiment au cœur des cultures égyptiennes assistant à quelques moments intimes entre le réalisateur et ses proches parfois surpris de la présence de la camera. C’est avec beaucoup d’humour qu’il entreprend de reproduire une apparition de la Vierge faite de bidouillage et d’amour familial. Un documentaire auquel nous pouvons reprocher de trop faire « brouillon » au niveau technique mais également au niveau du scénario. On voit que l’idée n’est pas déterminée puisque le réalisateur lui-même ne sait pas où il va et nous emmène avec lui dans son « roadtrip » à travers l’Egypte. Cependant on se laisse tout de même emporter par le réalisateur comme si nous étions vraiment auprès de lui , et ces détours inattendus nous amusent.  Lorsque on nous a annoncé le sujet du film – et le fait que c’était un documentaire- nous étions réticentes. Mais très vite, nous avons changé d’avis grâce aux fantaisies dont regorge ce documentaire très surprenant. Mine de rien, le sujet des fameuses apparitions est bien choisi et se révèle intéressant, il nous amène à réfléchir sur des croyances communes qui nous paraissent invraisemblables, mais qui pourtant apportent du bien à ceux qui y croient. D’autres élèves qui au contraire attendaient de documentaire, et pensaient y trouver des informations objectives sur la communauté copte, ont été déçus, sont restés « sur leur faim ». Certes, le reportage ne prend pas la tournure d’un cours classique, grand A, grand B. Le titre aurait d’ailleurs nous mettre la puce à l’oreille : Namir Abdel Messeh , croyant partir pour traiter de la foi des Coptes, part surtout à la recherche de ses propres racines : c’est une enquête sur sa famille, sur l’itinéraire d’une mère agaçante au possible, mais dont on mesure mieux l’itinéraire douloureux : pour s’intégrer dans la France des années 60, elle a rompu avec un univers pauvre dont elle a honte. En intervenant telle une mère « juive », plutôt intrusive (mais aussi salutaire !), elle retrouve aussi sa communauté, le village de son enfance et une part d’elle même qu’elle n’a jamais vraiment quittée. Le spectateur découvre au passage des paysages et une atmosphère chaleureuse qui a déserté nos campagnes. Ce reportage qui nous prétendait nous parler de la croyance en l’illusion traite bien, au final, d’une illusion : celle du cinéma ! Avec trois bouts de tissus et de la corde, l’illusion naît, comme un clin d’œil à Méliès, sous le ciel bleu d’un village égyptien (pays qui, entre parenthèses, a eu longtemps un cinéma très florissant). Un film qui parle de la croyance en la magie des images, voilà qui tombe bien pour notre première sortie du Prix Renoir ! Avis aux amateurs de documentaires non conventionnels pour passer 1h30 en compagnie de charmants personnages.

 

Caroline Chermiset & Anaïs Chériette, article composé à l’issue d’une discussion en classe… en novembre 2012.

 

 

 

 

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28 février 2013 4 28 /02 /février /2013 20:36

 

Rock et cinoche peuvent faire bon ménage... La preuve par l'image avec le nouveau clip de David Bowie, 2ème extrait de son album à venir. Prenez une rock star de légende, une "clippeuse", Floria Sigismondi,  au carnet d'adresse long comme le bras (Bowie, Leonard Cohen, The Cure, Tricky, Martina Topley Bird, Interpol, Muse, Sigur Ros, The White Stripes, Fiona Apple, et j'en passe) et par ailleurs réalisatrice d'un long métrage (The Runaways en 2010) et ajoutez une guest-star de luxe qui sait cultiver une légère ressemblance androgyne avec la rock star précitée (Tilda Swinton )... et hop... vous obtenez le résultat suivant : http://www.youtube.com/watch?v=gH7dMBcg-gE  

 

 

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3 février 2013 7 03 /02 /février /2013 19:27

paul-verhoeven.jpg

  

Starship Troopers de Paul Verhoeven (1997)

En se penchant sur le cas de Starship Troopers, une question, peut-être un peu facile, vient à l’esprit : quel avenir pour un cinéaste européen qui tente l’aventure à Hollywood ? On sait que les fortunes furent diverses, et le sont toujours d’ailleurs. La gloire peut être totale ou, à l’inverse, le sort se révéler cruel. C’est quitte ou double ! Paul Verhoeven, réalisateur hollandais, toujours en activité à ce jour, a connu un peu les deux dans la Cité des Anges. L’homme qui avait déjà obtenu la reconnaissance internationale grâce à ses films hollandais, enchaîne à partir de Robocop (1987) tourné après un film de transition (La chair et le diable, coproduction internationale sortie en 1985), quelques beaux succès au box-office à une époque où, depuis longtemps, les blockbusters font la loi à Hollywood. Lorsqu’il réalise Starship Troopers, Paul Verhoeven a fait gagner beaucoup d’argent aux studios ; il a tourné avec quelques grandes stars de l’époque (Arnold Schwarznegger) et a contribué à créer des mythes (Sharon Stone) le tout sur fond de polémiques déclenchées, à chaque film, par un cocktail, très 90’s, à base de violence et de sexe.

Avec ce sixième long métrage à Hollywood, on pense que le réalisateur a réussi la quadrature du cercle : parvenir à insuffler une vision personnelle du monde, de l’humanité, de l’histoire et de la politique dans une grosse production calibrée pour plaire au plus grand nombre. Une gageure qui suppose d’accepter le carcan imposé par des producteurs, soucieux avant tout que le film rapporte beaucoup de dollars, et de se plier à la loi des genres et des codes qui vont avec. De glorieux prédécesseurs l’avaient en leur temps réussi : Alfred Hitchcock continue d’être une référence en la matière. Starship Troopers, à première vue, remplit parfaitement son contrat d’abord parce qu’il se situe à la croisée de plusieurs genres qui font généralement le bonheur des spectateurs : le film de guerre et ses scènes de combat acharné contribue à la catharsis d’une armée de mâles occidentaux en manque de castagne ; le teen-movie et ses histoires d’amour contrariées permet l’identification des plus jeunes et rappellent quelques souvenirs émouvants aux plus vieux, effet « madeleine de Proust » garanti ; le space opera et ses voyages intergalactiques dans la lignée de Star Wars suscitent une fascination que seuls les soucoupes volantes et les vaisseaux spatiaux peuvent encore exercer sur les grands enfants que sont finalement les fans de cinéma ; enfin, le film de science-fiction vaguement gore et ses grosses bêbêtes (en l’occurrence des arachnides géantes aussi effrayantes que l’alien de Ridley Scott), seules capables de vous foutre une trouille pas possible, genre vous n’en dormirez pas de la nuit.

Mais l’intelligence de Verhoeven et de son scénariste, et donc la force du film, du moins dans sa première partie, c’est d’être capable de pervertir systématiquement et insidieusement les genres précédemment cités par le second degré et la parodie. Ainsi, la première scène de bataille (comme les suivantes) vire très vite au carnage pour les humains, et le film de devenir un pamphlet anti-militariste dans la lignée de Johnny got his gun ou des films de guerre de Stanley Kubrick (Paths of Glory). Les plans sur les amputations des vétérans se multiplient et transmettent assez clairement le message sur l’absurdité de la guerre à une époque où la première intervention en Irak, présentée comme la première guerre « propre » de l’histoire de l’humanité est encore dans toutes les mémoires. Depuis, les Etats-Unis n’en ont toujours pas fini avec la guerre. Tourné à l’époque Clinton, le film renvoie aussi aux guerres de l’Amérique républicaine à l’époque où elle est gouvernée par la dynastie Bush.

Le film de Verhoeven intercale aussi, l’air de rien, une grande variété d’images enclenchant ainsi une réflexion sur leur validité. Films de propagande, films de reportage (1ère séquence du film), films amateurs, etc… Des images souvent lisses, mensongères par omission pour certaines d’entre elles, des images de la pub, des soap-operas, mises bout à bout par un montage nerveux et « clipesque », respectant au pied de la lettre les canons esthétiques du film d’action. Ce sont les images de cette grande lessiveuse qu’est la culture de masse. Verhoeven en use et abuse avec un second degré assez jubilatoire et fait mouche, pour peu qu’on prête attention aux images qui se cachent derrière les images.

Ainsi va la première partie du film et c’est très bien, mais nul n’étant prophète à Hollywood, le réalisateur se prend finalement les pieds dans le tapis dans la deuxième partie (on notera au passage la structure en diptyque similaire à celle de Full Metal Jacket) et, du coup, c’est beaucoup moins bien. Les scènes de combat s’enchaînent avec pour seul objectif d’en coller plein la vue. Se détachent alors quelques moments dignes de la première partie : le portrait d’un général pleutre et apeuré ; les expériences sur le cerveau, chef des Arachnides, permettant au réalisateur de dénoncer la torture. Hélas, Verhoeven s’est un peu perdu en cours de route, et le spectateur, conscient que les producteurs ont très souvent le dernier mot à Hollywood, peut légitimement décrocher. Cela étant, Starship Troopers est un film réussi rappelant à bien des égards Aliens de James Cameron, mais ce n’est pas un chef d’œuvre. Il faut attendre Black Book (2005), son film sur la Seconde Guerre mondiale, tourné en Hollande, pour que Paul Verhoeven livre une oeuvre à la hauteur de ses ambitions, fermant ainsi, peut-être provisoirement, sa parenthèse hollywoodienne. On ne le dira jamais assez : pour le soldat engagé contre les Arachnides de Klendathu, comme pour le cinéaste parti tenter sa chance aux Etats-Unis, il n’y a rien de tel que le confort douillet de son chez soi. Home, sweet home !

Eric Popu

 

 

 

 

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29 février 2012 3 29 /02 /février /2012 12:18

http://blog.lefigaro.fr/daccord/mm.jpg

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2 janvier 2012 1 02 /01 /janvier /2012 20:00

Quels films ont marqué l'année 2011 ? Polisse récompensé à Cannes ? The Tree of Life, palme d'or ? The Artist, futur oscarisé ? Intouchables qui a cassé la baraque au box-office en France  ? Tintin version Spielberg ? Hum... Faut voir ! Voici le traditionnel bilan annuel, forcément subjectif, en 10 films...

 

L'Apollonide - souvenirs de la maison close

           1. L’Appolonide-Souvenirs de la maison close de Bertrand Bonello

2. Super 8 de J.J. Abrams.

 

3. Tomboy de Céline Sciamma.

 

4. Le gamin au vélo de Jean-Pierre et Luc Dardenne.

 

5. Hors Satan de Bruno Dumont.

 

6. L’étrange affaire Angélica de Manoel de Oliveira.

 

7. Detective Dee : le mystère de la flamme fantôme de Tsui Hark.

 

8. Habemus Papam de Nanni Moretti.

 

9. La piel que habito de Pedro Almodóvar.

 

10. Essential Killing de Jerzy Skolimowski.

   
Restless

Les "repêchés" (ou si le top 10 était un top 15) : Restless de Gus Van Sant, Une séparation d'Asghar Fahradi, La guerre est déclarée de Valérie Donzelli, Somewhere de Sofia Coppola, Tintin-Le secret de la Licorne de Steven Spielberg.

 

 

Les acteurs/actrices de l'année : ils ont été révélés ou confirmés, certain(e)s récompensé(e)s même, par l'année 2011.

    Michael Fassbender

Michael Fassbender, prix d'interprétation masculine à Venise (Shame de Steve McQueen), fut à l'affiche de trois films cette année dont A dangerous Method de David Cronenberg.

 

Elle Fanning

Elle Fanning, la révélation féminine de l'année à l'internationale et une filmo déjà prometteuse. En 2012, on la verra dans Twixt de Francis Ford Coppola.

 

Michel Piccoli

Michel Piccoli, un "monstre sacré" reparti bredouille de Cannes, alors qu'il était l'auteur d'une des meilleures performances de l'année dans Habemus Papam...

    Henry Hopper

        Henry Hopper, révélé par Gus Van Sant dans Restless.

 

    Kirsten Dunst 

Kirsten Dunst, récompensée à juste titre lors du festival de Cannes pour son rôle dans Melancholia de Lars Von Trier

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6 novembre 2011 7 06 /11 /novembre /2011 12:28

A partir du 7 novembre ...

 

 

Pour écouter l'album dans son intégralité, rendez-vous sur le site suivant : http://www.npr.org/2011/10/30/141598329/first-listen-david-lynch-crazy-clown-time

 

 

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1 novembre 2011 2 01 /11 /novembre /2011 11:34

Alors qu'elles s'apprêtent à faire l'actualité ciné des semaines à venir, Juliette Binoche, Marion Cotillard et Isabelle Huppert restent les stars françaises dont le rayonnement international ne se dément pas. Comme en témoignent les nombreux projets, très attendus, de ces trois drôles de dames...

 

    

Juliette Binoche multiplie les projets en France (prochain film de Sylvie Testud) et à l'internationale (dont Cosmopolis de David Cronenberg). Mais surtout, on l'annonce (et donc, on l'attend avec impatience !) dans le prochain film de Bruno Dumont consacré aux années d'enfermement de Camille Claudel.

 

    Marion Cotillard

 

Marion Cotillard, de son côté, ne quitte plus les studios hollywoodiens. Résultats : le 9 novembre sort Contagion, le nouveau long de Steven Soderbergh, présenté à la Mostra de Venise cette année. Elle est aussi attendue dans le prochain Batman (Christopher Nolan) et Low Life, le nouveau film de James Gray avec Joaquin Phoenix. Après Tim Burton, Abel Ferrara, Woody Allen, Michael Mann, Rob Marshall, Ridley Scott, la plus hollywoodienne des stars françaises trace sa route...

 

 

Elle a réalisé, cette année, une  performance incroyable dans My Little Princess d'Eva Ionesco. Elle sera bientôt à l'affiche de Mon pire cauchemar d'Anne Fontaine (à priori, pas le meilleur film de l'année, sortie le 9 novembre). On l'attend surtout dans trois films de réalisateurs, estampillés "Cannes", catégorie film d'auteur international de prestige : aux côtés de Jean-Louis Trintignant et d'Emmanuelle Riva (le casting qui tue !), Isabelle Huppert est dans le prochain film de Michael Haneke (pour une troisième collaboration après La Pianiste et Le temps du Loup). Elle est très attendue dans Captured, le nouveau film du philippin Brillante Mendoza. Elle est aussi annoncée au casting du prochain film du coréen Hong Sang-Soo. On peut déjà parier, sans prendre trop de risques, qu'Isabelle Huppert sera à nouveau présente à Cannes en 2012...

 

L'outsider...

   Léa Seydoux

C'est elle, c'est Léa. Après l'avoir vu chez Woody Allen, elle poursuit le grand écart entre les deux rives de l'Atlantique. On l'attend forcément dans le quatrième volet de Mission Impossible et chez Benoit Jacquot qui proposera en 2012 sa Marie-Antoinette (ce n'est pas elle mais Diane Kruger.)

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29 octobre 2011 6 29 /10 /octobre /2011 13:37

Festival l'Autre Cinéma

 

C'est un des principaux rendez-vous ciné de notre région. Le 4 novembre, commence la 12ème édition du festival international du film d'Arras.

Pour en savoir plus  : http://www.plan-sequence.asso.fr/festival.php

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27 octobre 2011 4 27 /10 /octobre /2011 15:04

 

         « L’histoire imaginée par Henri-Pierre Roché raconte simplement les tribulations de deux amis qui aiment la même femme durant plus de vingt ans. La façon dont ils accommodent la situation, c’est tout le sujet. Je crois que le film est (…) très tendre et d’une grande tristesse ». Ainsi, s’exprimait François Truffaut au début de l’année 1962 lors d’un entretien avec Michel Mardore, publié dans Les Lettres françaises au moment de la sortie française de Jules & Jim. (1)

 

Jules & Jim est le troisième long métrage de François Truffaut. « Le film naît d’une suite de coups de foudre » amicaux et/ou sentimentaux, « entre un lecteur et un roman, un cinéaste et un romancier, un réalisateur et une actrice » (2). Il reçoit un bon accueil de la plupart des critiques en dépit de quelques voix discordantes. (3) Dans l’entourage de Roché (décédé pendant le tournage des 400 coups) et des « vrais » protagonistes de l’histoire, l’accueil est aussi enthousiaste notamment de la part d’Helen Hessel qui a inspiré la Kathe du roman, et donc la Catherine du film. Cependant, à cause de l’interdiction aux jeunes de moins de dix-huit ans, le nombre d’entrée en France reste limité. Truffaut aura alors à cœur de défendre le film à l’étranger où il obtient d’ailleurs quelques prix.

 

Le film, resté présent dans les mémoires par Le tourbillon de la vie, chanson écrite par Serge Rezvani et chantée par Jeanne Moreau, est marqué par un ton particulier, une alliance des contraires, par ailleurs assez caractéristique de l’ensemble du cinéma de François Truffaut. En effet, le film juxtapose une dimension tragique (souffle de la passion fatale, désespoir d’une fin inévitable) et une forme de légèreté, une euphorie de vivre l’instant présent, un hymne à la vie surtout présent dans la première partie du film et pouvant générer un sentiment de nostalgie. Les indices du tragique sont très présents dans le film. Ainsi, dès le prologue, la voix de Jeanne Moreau/Catherine dit : « Tu m’as dit je t’aime ; je t’ai dit Attends ; j’allais dire prends-moi ; tu m’as dit va t’en ». L’issue dramatique de l’histoire d’amour se révèle dès le début du film. On se souvient aussi de la scène du saut dans la Seine (après la pièce de théâtre), sorte de prémonition du suicide final. Enfin, lors de la première escapade en vacances, Jules expose à Jim son projet de mariage avec Catherine. Jim réponds « je crains qu’elle ne soit jamais heureuse sur cette terre ». Le portrait de le jeune femme ainsi esquissé est plus contrasté qu’il n’y paraît : Catherine est une femme libérée, solaire, émancipée mais a aussi une part d’ombre. On notera que dans la réalité, c’est-à-dire dans l’histoire de Roché et de Franz et Helen Hessel, la fin ne fut pas dramatique du tout ; dans le roman, oui.

 

La mise en scène dans Jules & Jim illustre précisément cette alliance des contraires. Dans la première partie, c’est-à-dire avant la Grande Guerre (4), le montage est très rapide, les ellipses nombreuses, les plans sont courts comme des instantanées photographiques : Truffaut recourt d’ailleurs à des arrêts sur images dans une séquence inoubliable. La succession rapide des plans est un choix délibéré de Truffaut afin de coller au style sec de Roché et illustre finalement assez bien l’esprit « Nouvelle Vague ». En revanche, dans la deuxième partie, le filmage n’est pas tout à fait le même : les plans sont plus longs ; Truffaut privilégie les travellings, les panoramiques, les ouvertures de champ qui, dans un même élan, traduisent l’ivresse du mouvement, la griserie de la vie mais aussi la nostalgie qui naît de la fugacité de ces moments de bonheur… Cette partie du film paraît en rupture avec les canons stylistiques de la Nouvelle Vague puisque Truffaut utilise pour la première fois les « trucs » des vieux films muets (contemporains des événements racontés) comme les incrustations, l’ouverture à l’iris…

 

Avec Jules & Jim, François Truffaut aborde un certain nombre de thèmes qu’il retravaillera dans ses long-métrages suivants. Le film est d’abord une réflexion sur le couple (voir la série des Doinel à partir de Baisers volés). Mis en perspective, ce thème n’est pas spécialement « truffaldien » : en effet, il est au cœur des préoccupations de certains cinéastes de la modernité en Europe : on peut penser à Rossellini dans Voyage en Italie (1953), Ingmar Bergman dans toute son œuvre ou encore Michelangelo Antonioni dans Le cri ou encore La nuit dont l’actrice principale est justement Jeanne Moreau. L’originalité de Truffaut, si originalité il y a, est ailleurs. En effet, comme le rappelle Laure Defiolles dans Le dictionnaire Truffaut, le réalisateur fait alors le constat que « le couple n’est pas un mode de vie satisfaisant et que tout autre combinaison est impossible ».

 

Par ailleurs, et peut-être même surtout, la grande affaire de Jules & Jim est la peinture de la passion amoureuse, le grand sujet de Truffaut. Il marque son cinéma jusqu’à La femme d’à côté (1981) en passant par quelques autres œuvres incandescentes que sont La peau douce, La sirène du Mississippi ou encore L’histoire d’Adèle H. Pour Truffaut, l’amour, le désir sont une fatalité. L’engagement des héros comme des héroïnes de Truffaut dans l’amour est de l’ordre de l’adoration religieuse ; on lui voue un culte et d’ailleurs dans Jules & Jim, la femme est envisagée comme une déesse ou une icône (voir la séquence de la statue). Par ailleurs, l’amour engage toute l’âme et tout le corps : il se traduit par des manifestations physiques (évanouissement, vomissement, folie, etc…). Enfin, l’amour est souvent associé à la mort au-delà de la simple opposition Eros/Thanatos. Chez Truffaut, on a l’impression que dans ses films les plus inquiets et inquiétants, l’amour ne peut s’accomplir que dans la mort. Ainsi, dans Jules & Jim, lors de la scène des retrouvailles entre Catherine et Jim, le narrateur ne précise-t-il pas qu'« ils se prirent sans savoir pourquoi. C’était un enterrement ou comme s’ils étaient déjà morts ». C’est comme si l’amour ne s’accomplissait pleinement que dans la mort, libératrice et apaisante.

 

On a vu que l’amour à deux n’est guère satisfaisant. On garde en mémoire la conclusion terrible de Madame Jouve, la narratrice de La femme d’à côté : « Ni avec toi ni sans toi », expression employée pour résumer l’histoire d’amour tragique qu’ont vécue Mathilde et Bernard. D’où l’idée du trio qui parcourt l’ensemble de l’œuvre : dans Jules & Jim où Catherine s’entend dire qu’elle a voulu inventer une nouvelle forme d’amour, trio que l’on retrouve dans Les deux anglaises et le continent, Le dernier métro, ou encore La peau douce… Or, la solution du trio n’est guère plus satisfaisante non plus. Le trio amoureux chez Truffaut est une version plus sombre d’un classique de la comédie américaine, de nombreuses fois recyclé : on pense à Cukor dans The Philadelphia Story (Indiscrétions) mais surtout à Lubitsch, vénéré par Truffaut, dans Design for living (Sérénade à trois). La scénographie du trio dans Jules & Jim est très intéressante à analyser : elle révèle la place centrale de l’élément féminin, voulue par Truffaut alors que le roman de Roché est davantage attentif à l’histoire d’amitié entre Jules et Jim. La femme mène la danse et domine largement les deux hommes. Lors des scènes de marches ou de vélos, dans la scène de la course sur le pont, Jeanne Moreau/Catherine est toujours en pôle position. Dans le cas d’une disposition triangulaire, elle en est le sommet. Dans d’autres scènes, elle est toujours entre les deux hommes (au théâtre par exemple).

 

Avec Jules & Jim, Truffaut élabore sa théorie du « roman filmé ». Le film, en effet, n’est pas une adaptation littéraire au sens classique du terme. Ce que reprochait Truffaut aux réalisateurs de « la qualité française » c’était justement, en prenant le parti pris d’une transposition que l’on croyait la plus fidèle possible, d’étouffer le texte par une mise en scène un peu trop théâtrale et donc, selon Truffaut, de dénaturer ce texte par la suppression de certains passages impossibles à transformer en dialogues. Truffaut, au moment de préparer le film et d’écrire le scénario avec l’aide de Jean Gruault, choisit pour les passages qu’il apprécie le plus, ces passages « impossibles à transformer en dialogues ou trop beaux pour se laisser amputer » de recourir à la voix-off. Dans Jules & Jim, Michel Subor, le « petit soldat » de Godard, est cette voix-off, si caractéristique de l’œuvre du réalisateur. La narration se fait au passé simple, d’un ton neutre et détaché, absolument nécessaire selon Truffaut, pour que le spectateur adopte le recul nécessaire pour appréhender l’histoire du trio et éviter la tentation du jugement moral. Truffaut trouve ici un ton nouveau car, selon ses propres mots, « Jules & Jim est plutôt un livre cinématographique qu’un film littéraire » (4).

 

NOTES :

(1) Michel Mardore est un romancier, critique de cinéma, photographe  et réalisateur français (1935-2009). Les Lettres françaises sont une publication littéraire créée en France, en 1941, pendant l'Occupation par Jacques Decour et Jean Paulhan. Après la Libération et jusqu'en 1972, Les Lettres françaises, dirigées par Louis Aragon, bénéficient du soutien financier du PCF.

(2) Laure Defiolles dans Le dictionnaire Truffaut, page 221.

(3) Pierre Marcabru dans un article paru dans Combat reproche au film son « romantisme gris et sentimental, un romantisme qui ne correspond en rien à l’esprit et au cœur d’Henri-Pierre Roché ». Et d’évoquer aussi les pièges de l’adaptation littéraire : « c’est un genre faux, et c’est pourquoi Jules & Jimne vaut pas Tirez sur le pianiste où Truffaut prenait d’autres libertés ». S’agissant de l’adaptation, on peut rappeler que Truffaut et Gruault ont beaucoup élagué, « inventé » des scènes et intégré quelques passages de l’autre roman de Roché, Deux Anglaises et le Continent (par exemple le personnage de Thérèse interprété dans Jules & Jim par Marie Dubois).

(4) Les images de la Grande Guerre devaient être aussi le prétexte de citer un cinéaste, réalisateur de films noirs à ses débuts et grand amateur d’adaptations littéraires, à savoir Stanley Kubrick. En effet, Truffaut pensait utiliser des plans de Paths of glory (1957). Truffaut avait d’ailleurs écrit en ce sens à Kubrick. Les emprunts seront impossibles pour deux raisons : la présence de Kirk Douglas dans la plupart des plans choisis par Truffaut et puis le distributeur opposé à voir des plans des Sentiers de la gloire dans un autre film avant que Les sentiers de la gloire ne sortent en France car le film de Kubrick était, à cette époque, interdit en France. Truffaut se rabat alors sur des images d’archives.

BIBLIOGRAPHIE :

1) Ouvrages :

·        Antoine de Baecque et Serge Toubiana, François Truffaut, Paris, Gallimard, 1996.

·        Sous la direction d’Antoine de Baecque et d’Arnaud Guigue, Le dictionnaire Truffaut, Editions de la Martinière, Paris, 2004.

·        Jean Douchet, La Nouvelle Vague, Paris, Hazan, 1998.

·        Annette Insdorf, François Truffaut : les films de sa vie, Paris, Gallimard, Collection « Découvertes », 1996.

·        Cyril Neyrat, François Truffaut, Paris, Cahiers du Cinéma, Collection « Grands cinéastes », 2007.

·        François Truffaut, Jules et Jim, découpage intégral du film et dialogues, Paris, Editions du Seuil, 1971.

2) Périodiques :

·        Les Inrockuptibles, Truffaut le retour, n°249, juin-juillet 2000. Dossier sous la direction de Frédéric Bonnaud.

·        Télérama, Truffaut : une passion française, article de Marine Landrot, n°2857, octobre 2004.

3) Site internet :

www.cinematheque.fr/zooms/julesetjim.

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18 septembre 2011 7 18 /09 /septembre /2011 14:37

    Après avoir quitté l’Allemagne nazie et être passé rapidement par la France (réalisation de Liliom en 1934), Fritz Lang débarque aux Etats-Unis et plus précisément à Hollywood. Il signe alors un contrat avec David O. Selznick, qui le lie à la M.G.M. Après plusieurs projets qui n’aboutissent pas, Lang propose l’idée de Fury qui retient l’attention du studio. Le film sort en 1936 et si l’on en croit le réalisateur allemand, " Fury était un film dans la lignée de ce que j’avais commencé en Europe avec M. "

 

Fritz Lang plus que jamais pertinent pour analyser les "dérapages" totalitaires des démocraties. Un cinéma toujours d'actualité comme en témoignent l'expo consacré à Metropolis à la Cinémathèque de Paris et la sortie de Fritz Lang au travail aux éditions des Cahiers du cinéma.

 

 

A l’origine du scénario, co-écrit par Fritz Lang, il y a un fait divers, lu dans les journaux par le réalisateur : un lynchage près de San Francisco est le prétexte pour Lang de faire un film à forte tonalité politico-sociale assez caractéristique de ses premières productions hollywoodiennes (voir aussi J’ai le droit de vivre en 1937 avec Henry Fonda et Casier judiciaire en 1938). Les trois films ont d'ailleurs pour vedette féminine Sylvia Sydney. Fury est une réflexion profondément désenchantée sur le fonctionnement de la justice dans une grande démocratie (voir discours final de Joe au tribunal).

Fury est un film qui parle d'hier (les années 30) mais qui entre pourtant en résonnance avec aujoud'hui. Pourquoi ? Comment ? Voici quelques pistes de réflexion...


 

1/Une réflexion sur l'ambivalence de la nature humaine.

        ð Loin de tout manichéisme, les individus mis en scène par Fritz Lang ne sont ni bons ni mauvais mais souvent les deux : ainsi, dans Fury, Joe, amoureux transi face à Kat, volontiers moralisateur face à ses frères dans la 1ère partie du film, bascule du côté obscur dans la 2ème partie : sa soif de vengeance le rend semblable à ceux qui lui ont fait du mal. A l'inverse, le criminel peut aussi se révéler humain : ainsi, l'aveu d'une des accusés au procès témoigne de la possibilité de se repentir (voir aussi la séquence finale de M Le Maudit).

        ð Sur un plan plastique, Fritz Lang privilégie alors l'opposition entre l'ombre et la lumière (en particulier sur les visages lors de la scène de l'incendie de la prison). D'où l'importance aussi des miroirs, glaces ou vitrines dans Fury comme dans d’autres de ses films. Elles traduisent les combats intérieurs du héros, sa conscience malmenée au moment de faire un choix moral. (voir aussi La femme au portrait).

 

 

2/ La confrontation individu/foule.

        ð Le héros langien est souvent un homme traqué dans une atmosphère de claustrophobie et d'asphyxie (cf. la prison dans Fury). Il apparaît écrasé par le destin, victime d'un enchaînement de circonstances qui le conduisent à sa propre perte. Il doit alors se démener pour prouver son innocence (thème du faux coupable présent aussi dans le cinéma d'Alfred Hitchcock). Jean-Luc Godard parlait ainsi du cinéma de Lang : "Tous les scénarios de Lang sont construits de la même façon : le hasard force un personnage à sortir de sa coquille d'individualiste et à devenir un héros tragique dans la mesure où il force la main au destin qui lui est brusquement imposé".

        ð Dans son parcours, ce héros est fatalement confronté à une foule incontrôlable, mue par l'impulsivité plutôt que par la réflexion. Elle est intolérante, volontiers xénophobe, traversée de peurs nourries par les préjugés. La foule, chez Fritz Lang, met en avant l'irrationnel collectif couvant au fond de l'homme révélant ainsi ses plus bas instincts. D'ailleurs, Kat, l'héroïne de Fury le verbalise clairement : "une foule ne pense pas". On retrouve ce constat - plutôt pessimiste et qui oppose le réalisateur allemand à la vision d'un Eisenstein par exemple - dans M Le Maudit et Metropolis.

 

 

3/ Une réflexion plus politique sur les limites des sociétés démocratiques.

La plupart des films de Lang mettent en avant les dangers qui guettent toute société démocratique, alertent le spectateur sur les dérives totalitaires possibles dans toute démocratie.

        ð Fritz Lang montre dans Fury mais aussi dans M Le Maudit une société faite de dénonciations, de rumeurs, de fausses informations. Le volet central du film est occupée par la circulation de la rumeur (scène du barbier + les femmes jouent au "téléphone arabe" = plan de coupe des poules, marque d'un regard omniscient et subjectif du réalisateur qui utilise le "montage attraction" défini par André Bazin dans Qu'est-ce que le cinéma ? comme "le renforcement de sens d'une image par le rapprochement avec une autre image qui n'appartient pas nécessairement au même événement" ). L'information est alors amplifiée, déformée et attise la volonté de faire justice soi-même. Cette même société est traversée de réflexes xénophobes : dans Fury, on ne cesse de jeter l'opprobre sur l'étranger : le tueur est censé venir de Chicago ; au tribunal, les témoins affirment que les incendiaires venaient d'ailleurs. Joe est le parfait bouc-émissaire permettant à la petite ville de déverser son trop plein de haine; d'assouvir sa soif de vengeance et , par la même, de souder les différents éléments de cette communauté dont l'union est éclatante au moment du procès. Lang parle alors de la société américaine comme il parlerait de la société allemande sous le nazisme : en 1936, c'est le Juif qui est le bouc-émissaire.

        ð le conflit entre la loi et l'illégalité est un thème récurrent chez Lang. La justice y est toujours battue en brèche : non respect de la présomption d'innocence (le héros est jugé coupable sans procès ; il n'est pas à l'abri de l'arbitraire), recours à des pratiques interdites par la loi (dans Fury le lynchage), les forces de l'ordre ne sont pas respectées (assaut de la prison, autorité du shérif bafouée), accumulation de mensonges dans le prétoire par les témoins après serment. Ce n'est plus la Loi qui gouverne mais la pression de la foule.

        ð l'attitude des politiciens est, à cet égard, aussi exemplaire : leur intérêt personnel prend le pas sur la Loi (l'arrestation d'un coupable devient une priorité, peu importe qui il est). La démagogie est aussi très présente dans les discours des mêmes politiciens : ainsi, dans Fury, n'entend-on pas qu'"on n'envoie pas la troupe en année électorale" ou encore que la "troupe heurte la fierté du peuple" !

 

 

4/ Le pouvoir de l’image.

Très amer quant au fonctionnement de la justice dans des sociétés soi-disant démocratiques, Fritz Lang accorde dans Fury beaucoup de crédit au pouvoir de l’image et défend la thèse de la caméra-témoin, révélatrice de la vérité. La scène du procès de Joe est, à cet égard, exemplaire : alors que les témoins, paisibles citoyens mais lyncheurs potentiels et aussi menteurs que des arracheurs de dents, se succèdent à la barre, les images tournées par les journalistes (doubles probables du réalisateur) viennent faire éclater la vérité.

 

 

Eric Popu

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